Samedi 21/09
Journée de repos, consacrée à la lessive au bord de la rivière. Une petite berbère et sa mère nous prêtent leur planche crénelée pour frotter le linge dessus. La petite nous regarde faire attentivement, puis nous montre les gestes, il faut même l'arrêter sinon elle va nous laver tout le linge !
Nous visitons les alentours, cultures en terrasse, le coin a l'air mieux irrigué qu'ailleurs.
Le propriétaire du terrain sur lequel nous campons nous invite à boire le thé.
Dimanche 22/09
Au réveil, il fait bien froid. Il suffit de lever les yeux pour comprendre : le ciel est couvert. Nous prenons pulls et coupe-vents. Mais le temps de traverser des montagnes pelées, paysages dégagés, gorges, plaines, le soleil est revenu pour la pause déjeuner. Il fait très chaud à présent.
Après avoir passé des mines de cuivre et un village dans lequel le portillon d'une maison, entièrement fabriqué à partir d'un bidon TOTAL, fait sa petite impression, nous mettons pied à terre pour déjeuner.
Le paysage est désertique; on se sent, réellement, au milieu de nulle part.
Quelques-uns s'aventurent dans le village d'Azegour tout proche pour téléphoner, mais il n'y a pas un chat. Téléboutique fermée par un verrou, personne pour nous renseigner. Le vent soulève la poussière dans les allées vides du douar, et sur la place carrée où les emplacements prévus pour les échoppes du souk côtoient une boîte aux lettres à l'abandon.
Nous entendons un faible son de radio et nous approchons; un homme est en train de travailler sur des pièces mécanique, dans la pénombre d'une maison. Il nous apprend que les cabines de téléphone ne fonctionnent pas.
L'après-midi, nous traversons plusieurs villages, où les habitants nous disent toujours bonjour avec beaucoup de chaleur.
Vision furtive d'une porte colorée, une cour ombragée, une famille au bord du chemin, un sourire à ces drôles de voyageurs qui passent. "Bonjourunstylo" ou "unbonbon", leitmotiv chez les enfants.
Après une ascension dans le maquis, au soleil couchant, nous arrivons à l'étape du soir. Le superbe plateau de Toulkine, après le village de Tnirt, sera notre halte.
La terre y est rouge, les buissons pleins d'odeur, et le maquis, autour de la clairière, très dense.
A la tombée du soir, des nuages menaçants ont envahi le ciel, il fait brusquement froid, si froid même qu'on dîne avec le duvet sur les genoux. L'askif (soupe berbère) fait un bien fou. On se couche tôt, après quelques parties de tarot et
chahuts coutumiers.
Lundi 23/09
Nous nous réveillons avec le soleil, pile en face de l'ouverture de la tente. Un petit déjeuner chauffés comme des chats dans ses rayons. L'étape du matin est magnifique : beaucoup de dénivelés, passages un peu risqués (ça grimpe, c'est étroit, ça tourne, le tout avec des cailloux qui glissent et roulent.) Nous traversons des villages escarpés, accrochés au flanc des montagnes, maisons en terre ou en pierre fondues comme des caméléons dans le paysage.
On se croirait maintenant au Pérou : perspective, montagnes pelées, chemins accidentés, maïs séchant sur les toits en terrasse. Et le linge, coloré, qui sèche sur les maisons.
Nous passons un long canyon, de pierre rouge et brune. La source d'Imi Tala (imi, la bouche en berbère), puis d'autres gorges plus tard, et à nouveau un oued asséché.
Nos chevaux foulent son lit de caillasse grise qui sonne comme de l'ardoise. Figuiers, noyers, figuiers de Barbarie en pagaille, croulant sous les fruits dont l'abondance surprend.
Au déjeuner, pique-nique dans un coin de paradis (Taghzout), inaccessible au camion de l'assistance, nous profitons d'un joli torrent à l'ombre des noyers. Un cheval croque des noix entière, le bruit nous fait sursauter. L'après-midi, les chevaux escaladent littéralement la montagne, sur des chemins à peine praticables par moment. Un village de terre, avec sa mosquée rose, impeccable, comme un diamant sur un tas de terre. Soudain nous rejoignons des pistes mieux tracées, où peuvent passer des véhicules. Fin d'étape, arrivée à Imidel : tout en bas, minuscule, le camion bleu de l'assistance apparaît.
Mardi 24/09
Une étape "spécial rivières".
Nous voilà téléportés dans l'Ardèche. Chemins de galets, jolis galops dans le sable qui se terminent dans un oued peu profond mais suffisant pour éclabousser tout le monde.
A l'étape du soir, nous campons au milieu d'habitations modernes construites pas des Français. Sous un tapis d'étoiles, nous emmenons les chevaux boire à la rivière. En pleine nuit, des chiens (errants?) hurlent à qui mieux mieux, et nous laisserons la surprise d'une poubelle éparpillée...
Mercredi 25/09
Etreinte glacée de l'air qui entre dans la tente au petit matin, comme pour venir se réchauffer entre nos sacs de couchage. A 7h, c'est une activité de fourmilière dans le campement, car c'est la "grosse" étape, 1000 mètres de dénivelé, 8h à cheval.
La matinée (6H à cheval !) commence par 14 kms de piste assez large, à flanc de montagne.
Sous un ciel limpide, d'un bleu royal, avec un soleil des grands jours d'été, nous traversons à nouveau les villages typiques du Haut-Atlas. Les habitants, presque toujours des enfants, nous saluent gaiement, et nous avons même droit à des cris de fête qui nous poursuivent longtemps. Parfois les enfants courent même après notre caravane sur des centaines de mètres.
Fin de la piste. On s'arrête quelques minutes pour ressangler les selles, avant d'attaquer le fameux dénivelé, qui, vu d'en bas, force le respect. Un serpentin de centaures défile sur la montagne : nos petits barbes avalent la pente comme des machines, et nous, penchés en avant, parallèles à l'inclinaison du sol ou presque, ne serions même pas capables d'en faire autant.
Petit à petit, la montagne se met à ressembler aux Alpes. Au passage d'un col, la vue est spectaculaire, nous sommes à 1800 m. L'ascension se poursuit jusqu'à 2500 mètres, dans un décor fabuleux. Un grand vent froid nous déstabilise à chaque passage de col, et au loin, la piste que nous avons empruntée tout à l'heure paraît minuscule. La vallée de l'oued N'Fis, aussi.
Il reste la descente à faire, à pied, sur des sentiers de méchants cailloux et de
gravillons. Les chevilles valsent, mais les chaps jouent leur rôle d'attèles.
Pause déjeuner sous les noyers, des berbères récoltent les noix et chargent les chouaris (paniers) des mules. Nous repartons pour les 2h restantes, et atteignons la vallée (1800m d'altitude) où un gîte nous accueille pour la nuit.
On profite du hammam public, tout au bout du village. 15 Dhs par personne (un prix "touriste" probablement, nous sommes ravis de contribuer à améliorer le quotidien du village.) Le feu brûle, avec de grandes flammes rouges, et à l'intérieur l'eau est brûlante.
Il faut alimenter le bac en ciment qui chauffe l'eau froide, et mélanger l'eau chaude avec de l'eau froide dans des seaux. Ensuite, on se verse l'eau dessus avec des récipients en plastique ou boites de conserve.
Jeudi 26/09
La fin de l'aventure approche, et avec le contre-coup de la grande journée d'hier, l'ambiance est moins gaie. Npus profitons encore deux hauteurs, longeons un parc à mouflons sans toutefois en apercevoir.
Au détour d'un chemin, nous voici face au Toubkal, majestueux, sommet de l'Afrique du Nord. C'est un peu comme regarder le Mont-Blanc, c'est un peu asbtrait, le point le plus haut n'est pas beaucoup plus haut que les sommets qui l'entourent, et on a du mal à le trouver...
Enfin, nous descendons de la montagne (à cheval comme dit la chanson.)
Dernière étape dans un village typique, nous profitons du toit en terrasse pour dormir à la belle étoile, avec juste la tête qui dépasse du sac et se laisse caresser par une brise tiède.
Vendredi 27/09
La caravane se met en marche à l'appel du muezzin. Cette dernière étape nous emmène sur une piste légèrement vallonnée, au milieu d'un décor de colorado. Nous croisons des gens qui vont voter, leur carte d'électeur à la main.
Puis nous coupons par la montagne de terre rouge, slalomant entre les thuyas, oliviers, pins... faisons halte pour
admirer le panorama de montagnes arides, teintées de rouges et d'ocres.
Quelques heures plus tard, nous renouons à regret avec la civilisation, les pots d'échappements, la foule et la fureur de Marrakech. Malgré une intéressante visite de la ville, nos souvenirs les plus forts seront les berbères, leur mode de vie austère et les paysages si variés de cette région.
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