Ghita, Collégienne à vélo - encourageons la scolarité des filles rurales !
L'idée : le collège est à 7 km par des pistes caillouteuses... pas de transport, et un vélo coûte cher. L'éloignement du collège est l'un des facteurs majeurs d'abandon scolaire chez les filles rurales.
Apporter des fournitures scolaires ne suffit pas. En offrant un vélo à une collégienne, nous encourageons davantage sa scolarité.
L'histoire :
Juin 2006, Skoura. Nous assistons à la fête de fin d'année et aux annonces des passages de classe dans la petite école d'Oulad lâarbiya. A chaque élève nous remettons un cadeau d'encouragement (1 livre illustré et des stylos) et aux meilleurs élèves, un second cadeau. Parmi les élèves de 6ème année, Ghita a réussi; avec une moyenne de 7,19 elle est 2ème de sa classe et ira au collège l'an prochain.
Brillante et déterminée, Ghita sait ce qu'elle veut, "apprendre apprendre apprendre", progresser encore en français, étudier encore et toujours. Elle est impressionnante de sagesse et de maturité. Elle fait l'effort de nous parler en français, alors que les autres enfants s'adressent souvent à nous en arabe.
Mais sa situation familiale est précaire, sa mère devra faire des sacrifices importants pour lui acheter un vélo en plus de tous les frais de scolarisation (inscriptions, fournitures scolaires...) Nous connaissons d'autres jeunes filles qui étudient chez elles, dans le même village, toutes se sont arrêtées à la fin de la 6ème année, à cause de l'éloignement du collège. Kbira est l'une d'elle; elle récupère les cours par des collégiens, étudie seule, progresse doucement...
Touchés par le destin de Ghita et à travers elle, de toutes les filles qui risquent de ne pas poursuivre leurs études, nous décidons d'agir.
Pourquoi les filles ? parce qu'elles sont les premières déscolarisées par une absence de moyen de transport qui les pénalise davantage que les garçons.
Deux chiffres : en zone rurale, moins d'une fille sur 10 (8,9%) accède au collège, contre 52,3% en milieu urbain
En revanche une fois entrées au collège, les filles y réussissent mieux que les garçons : la proportion de collégiennes commençant la 1ère année d’étude au collège et achevant la 3ème année est de 22,7% dans le monde rural contre 17,4% pour les garçons.
[source : PNUD Maroc, Rapport National 2005 sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement]
Le 30 octobre dernier, grâce à la générosité de Rosy que nous remercions chaleureusement, nous avons pu offir à Ghita un VTT tout équipé (photo ci-contre), un "picala" comme on dit en dialecte local ;-)
Le projet :
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Un VTT ne règle pas tout...
Nous avons cherché à savoir si d'autres filles des environs étaient dans le même cas.
Nous discutons avec Ghita: sur 9 élèves de sa classe, 8 sont passés en 7ème année (1e année du collège), 4 filles et 4 garçons, dont deux filles n'iront probablement pas au collège. Nous demandons pourquoi; c'est loin, manque de moyen, manque de motivation, les motifs se mélangent, difficile de trouver l'obstacle principal à lever.
Nous demandons à Ghita ce qu'elle en pense : si elles avaient une bicyclette et les fournitures scolaires, iraient-elles au collège ? Ghita semble dubitative, "peut-être", mais si quelqu'un ne veut pas étudier, on ne peut rien pour lui.
Nous avons interrogé ces deux jeunes filles; une réponse sans appel : "nous ne voulons pas continuer nos études, nous ne sommes pas intéressées."
Nous en avons discuté avec l'instituteur pour connaître les raisons de l'abandon scolaire des filles, et comme l'a dit Ghita, elles sont multiples... Mais résoudre le problème du transport peut être un levier important dans la décision de poursuivre les études.
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Pourquoi un vélo ?
Parce que le collège est pour certains élèves de Skoura, à des km par une piste caillouteuse, et qu'il n'y a aucun moyen de transport : ni ramassage scolaire, ni solutions alternatives. La plupart des élèves s'y rendent à vélo, effectuant des distances plus ou moins grandes à travers la palmeraie de Skoura. Sur la photo de droite, voyez la distance qui sépare la maison de Ghita, représentée en bas, et le collège, tout en haut (voir la carte.)
Au collège, le gardien surveille tous les vélos parqués contre le mur d'enceinte de l'établissement. Les réparateurs de vélos sont nombreux dans toute la palmeraie.
Le choix du vélo :
7 km par la piste, une piste qui traverse 3 oueds à sec, beaucoup de cailloux et gravier, et du dénivelé ! On y croise mobylettes, ânes tirant charettes, et de rares voitures.
Autant dire qu'aller au collège vaut une bonne heure de sport... d'autant plus que les collégiennes font deux allers-retours tous les jours, car elles reviennent déjeuner chez elles le midi (il n'y a pas de cantine scolaire, l'internat est saturé...)
Un vélo solide s'imposait, pour tenir la distance. VTT avec un cadre solide, de bons pneus, et nous y avons ajouté une housse de selle, une pompe et un tendeur pour le porte-bagage.
Le même jour nous avons remis à Ghita et à sa camarade Meryem, collégienne du même village, un cartable avec des fournitures et quelques vêtements.
Les résultats :
* Pour Ghita, de meilleures conditions d'étude, une motivation accrue.
Temps de trajet plus courts, sécurité, autonomie.
* Pour ses camarades que nous avons proposé d'aider (celles qui ont besoin de notre coup de pouce), un espoir et une motivation... pour cette année, cela n'a pas suffi à les décider.
* Pour les futures collégiennes de la rentrée 2007, également un espoir et peut-être un poids dans la balance de leur réflexion de juin prochain : continuer les études ou arrêter après la 6ème année ?
Des nouvelles en 2007 :
- Nous étendons cette action à plusieurs collégiennes et lycéennes de la région... >Voir le projet "Picala"
- Ghita a obtenu d'excellents résultats : une moyenne de 14,9 au premier semestre, et 15,2 au second semestre.
- Ghita a beaucoup de chance : sa marraine a décidé de lui offrir des conditions encore meilleures pour étudier, avec une place à l'internat du collège (lire la suite)